Résister à la vague de concentrations
La France a toujours occupé une place toute particulière sur l'échiquier mondial des semences. Alors que les entreprises françaises sont en train de vivre deux campagnes compliquées d'affilée, résisteront-elles aux grandes manoeuvres qui sont en train de se dérouler à l'échelle internationale ?
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Après une campagne 2014-2015 au beau fixe pour les semenciers français, les ventes 2015-2016 de semences en France se tassent de 3 % à 1,739 M€, contre 1,785 M€ l'exercice précédent, et la campagne en cours s'annonce plus compliquée encore. « La plupart des espèces ont été concernées par un recul des ventes au cours du dernier exercice, reconnaît Philippe Silhol, chef du service statistiques au Gnis. La baisse est très importante en céréales à paille, - 9 %, alors que les surfaces étaient en augmentation. Le taux d'utilisation de semences certifiées en blé a fortement chuté, à 48 % contre 54 %, la campagne précédente. Les ventes de semences de protéagineux ont un peu augmenté, mais elles pèsent si peu dans l'ensemble. » Le maïs a aussi enregistré un recul de 10 %, lié cette fois à une baisse des surfaces en fourrage et surtout en grain, après une perte déjà de près de 9 % l'an passé. Or, céréales à paille et maïs pèsent pour près de 50 % du marché des semences en France. « Les potagères qui traditionnellement se portent assez bien, ont également vu leur marché s'effriter, constate le responsable du Gnis. Le printemps calamiteux que nous avons connu, n'a pas incité les jardiniers à acheter des semences, et a compliqué la vie des maraîchers professionnels. » Si les marchés des semences d'oléagineux et de betteraves sucrières se sont tout juste stabilisés, en revanche ceux des fourragères et des plants de pommes de terre retrouvent de la couleur. « En fourragères, on avait connu plusieurs années de forte baisse de suite, précise Philippe Silhol. Et en plants de pommes de terre, l'année dernière avait été très difficile pour les producteurs de consommation, les ventes de plants en avaient souffert. »
En bouclant 2015-2016 en demi-teinte, les semenciers étaient loin d'imaginer au printemps, les difficultés que les agriculteurs allaient rencontrer cette année, avec un printemps beaucoup trop humide et un été beaucoup trop sec. « Les premières estimations pour la campagne d'automne 2016-2017 ne sont pas bonnes, ajoute Philippe Silhol. On évoque une nouvelle baisse des ventes de semences de blé de 15 % en tonnage. Même si une partie des semences est vendue en dose, les PMG, poids de mille grains, des semences sont très faibles cette année, ce qui accroît la baisse. L'automne très sec n'a pas favorisé non plus l'implantation du colza. On sait que les surfaces de betteraves vont augmenter au printemps. Il est par contre difficile de se prononcer sur les autres espèces. » Si le marché intérieur fait actuellement profil bas, la France vient d'enregistrer un nouveau record à l'exportation en semences, à 1,588 Md€, contre 1,46 l'an dernier. Elle conforte ainsi sa place de premier exportateur mondial de semences ! « Les ventes de maïs, point fort de la France à l'export, baissent un peu de 3 %, mais les ventes hors de nos frontières, de semences d'oléagineux, surtout de tournesol, font un bond de 30 %, et celles de potagères et florales, deuxième fleuron de la France sur les marchés mondiaux, grimpent de 10 %. » Cette embellie ne compense cependant pas le repli sur le territoire national.
Dans un contexte économique compliqué pour les semenciers français, un nouveau vent de concentrations souffle sur le secteur des semences à l'échelle internationale. Les entreprises françaises ont toujours eu des positions de choix au plan européen, et même à l'échelle de la planète. Une de nos entreprises, Limagrain figure parmi les quatre premiers groupes mondiaux, et trois se hissent dans les quinze premiers. Le contexte réglementaire offrira-t-il aux entreprises françaises les opportunités pour franchir ce nouveau cap ? C'est tout l'enjeu des débats en cours, notamment sur les nouvelles techniques de sélection ou sur la protection de la propriété intellectuelle.
DOSSIER RÉALISÉ PAR BLANDINE CAILLIEZ
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